Les tests ADN récréatifs : Mettent-ils en danger nos données personnelles ?

Aujourd'hui, de nombreuses entreprises américaines commercialisent des kits de tests ADN salivaires sur internet. Ainsi, il vous est possible de « découvrir votre ascendance », de révéler votre « patrimoine génétique unique » et de trouver un nouveau parent pour moins d'une centaine d'euros. Une fois le prélèvement effectué, il vous suffit de le retourner à leur laboratoire et le tour est joué : vous recevrez un résultat détaillé en quelques semaines.
L'engouement autour de la démocratisation de ces tests ADN a de quoi donner envie, au point de nous faire oublier que de tels tests sont strictement interdits en France, et qu'un tel traitement de nos informations génétiques met potentiellement en péril nos données personnelles.
Des tests illégaux au cœur des débats juridiques
L'article 226-28-1 du Code pénal interdit la sollicitation de l'examen de ses propres caractéristiques génétiques ou de celles d'un tiers, en dehors des hypothèses très précises encadrées par la loi, justifiées par des nécessitées scientifiques, médicales et judiciaires. De tels faits sont punis par une amende s'élevant à 3.750 euros. De quoi ôter toute envie de cracher dans un tube.
Le Conseil Bioéthique a d'ailleurs clairement exprimé sa réticence face à ces tests génétiques récréatifs. Si de nombreux élus ont demandé en vain leur légalisation pour « mettre fin à l'hypocrisie », un nouveau texte a été voté en octobre 2019 par l'Assemblée Nationale. Ce texte a rendu la publicité de ces tests récréatifs explicitement illégale et a ainsi renforcer à nouveau leur contrôle.
Le Règlement Général sur la protection des données (RGPD) : protection des « données sensibles » et réaffirmation de nos droits.
Il s'agit de toutes « les informations qui révèlent la prétendue origine raciale ou ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques ou l'appartenance syndicale, ainsi que le traitement des données génétiques, des données biométriques aux fins d'identifier une personne physique de manière unique, des données concernant la santé ou des données concernant la vie sexuelle ou l'orientation sexuelle d'une personne physique ».
Le RGPD a permis d'ajouter les données génétiques et biométriques à cette longue définition. Si des exceptions sont prévues, elles sont extrêmement encadrées par le Code Pénal ou le Code de la Santé publique et le consentement explicite des individus est absolument indispensable.
La mise en garde de la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (CNIL)
En 2017, la CNIL a indiqué dans un rapport que « les données génétiques présentent aussi la particularité d'être non seulement personnelles mais aussi pluripersonnelles car transmissibles et partagées». Autrement dit, si des parents proches ont effectué ce type de test, ils ont fait fuité une partie de votre patrimoine génétique vers des acteurs économiques sans que vous ne puissiez le maitriser.
En 2004, le groupe de travail commun des CNILs européennes avait ainsi soulevé les nombreux problèmes liés à la conciliation « entre le respect du secret médical, la nécessité de protéger la santé des membres de la famille, et le droit de ne pas savoir. »
C'est pourquoi il est primordial d'avoir connaissance des normes et institutions dont la principale mission est de nous protéger, en particulier face au monde numérique dont les dangers peuvent encore nous échapper.
Article rédigé par Maëva BONHOMME, étudiante en deuxième année de licence et clinicienne en droit.